Vingt et un centimètres, Andy

Personnalité plus que complexe, Andy Wharol fascine encore aujourd’hui. S’il pensait que réussir commercialement était une forme d’art, l’univers de Wharol n’est pas moins constitué que d’argent et de réussite.

Pour connaître Andy Wharol, il faut d’abord se repaître, avec délectation, des nombreux aphorismes qu’il nous a laissés. Le plus célèbre d’entre eux : « A l’avenir, chacun aura son quart d’heure de célébrité mondiale ». Phrase au combien prémonitoire, quand on la mesure à l’audience des émissions de la télé réalité d’aujourd’hui.

Mais commençons par le commencement. Celui qui ne s’appelle alors qu’Andrew Wharola est né à Pittsburgh en Pennsylvanie en 1928. À partir de 1945, il fait des études au Carnegie Institute of Technologie et obtient en 1949, son diplôme de fin d’études. Immédiatement, il déménage à New York, déjà bourré de talent, Vogue, Glamour et Harper’s Bazar font immédiatement appel à lui. Il devient vite célèbre comme dessinateur de publicité. C’est un agitateur, qui bouscule les habitudes bien établies de la société new-yorkaise.

C’est en imaginant des chaussures pour le magazine Glamour qu’il va faire décoller sa cote de popularité. Il rajoute des détails réalistes et étonnants qui transforment les dites chaussures en objets de curiosité, en sculptures, en monument des temps modernes. Il transcende un objet jusqu’alors considéré dans son utilité. C’est à cette époque qu’il décide d’abréger son nom et se fait appeler Andy Warhol.

Pendant l’année 1956, il fait le tour du monde et de nombreux séjours en Europe. C’est en 1962 qu’il commence à peindre, et Andy Warhol imagine son l’art comme une production. Il veut devenir riche et célèbre et il le fait, mais surtout il le dit. Il veut produire beaucoup et imagine un art de répétition : « Tous les tableaux devraient être de la même taille et de la même couleur de sorte qu’ils seraient interchangeables et que personne n’aurait le sentiment d’en posséder un bon ou un mauvais ». « J’aime les choses barbantes. J’aime que les choses soient exactement pareilles, encore et encore ». Pour cela il a besoin d’un lieu, ce sera la Factory ou autrement dit l’usine, un endroit ou l’on entre anonyme et d’où l’on sort superstar.

« Si vous voulez tout savoir sur Andy Warhol, vous n’avez qu’à regarder la surface de mes peintures, de mes films, de moi. Me voilà. Il n’y a rien dessous ».

Warhol choisit pour modèles des images de la société américaines connus de tous, les portraits de Marylin Monroe, de Nathalie Wood, d’Elvis Presley, les boîtes de soupe de la marque Campbell, les bouteilles de Coca-Cola Cola etc.. Des vignettes qu’il collectionne depuis qu’il est enfant. Il peint également des séries sur les catastrophes : Car Crash, Suicide, Electric Chair. Toutes ces images symbolisent pour lui, le fils d’émigrés Tchèques, l’Amérique. La Factory sert alors à produire à la chaîne des sérigraphies et des assistants effectuent toute la réalisation visuelle des tableaux d’après des esquisses de Warhol. Déjà le monde de l’art contemporain se divise entre ceux qui adorent et ceux qui détestent. Mais c’est surtout la personnalité controversée de Warhol qui posera problème.

Une usine à fabriquer des stars

La Factory est un grand hangar, qui sert aussi d’appartement, de lieu de tournage, d’atelier, et de point de rendez-vous à tous ceux qui passent sans aucune distinction. Le gratin de la jet-set new-yorkaise y défile mais aussi d’illustres inconnus alcooliques, paumés ou toxicomanes qui se mêlent dans des fêtes géantes et mémorables. Tout le monde est logé à la même enseigne : pour être une star, il suffit d’être là. La Factory devient une grande machine à produire des évènements. Warhol est le maître de cérémonies. « La notoriété, c’est comme de manger des cacahuètes : quand on commence, on ne peut plus s’arrêter », dit-il. Mais tout n’est pas rose dans le monde d’Andy Warhol, le dandy à la perruche blanche, qui d’après certains détracteurs étouffe la personnalité des autres. Beaucoup de « collaborations » se terminent par des ruptures extrêmement violentes. Comme Valérie Solanis, qui, après avoir tiré deux fois sur Andy, déclarera à la police : « Warhol avait trop de contrôle sur ma vie ». Le maître est une sorte de vampire qui se nourrit des autres. Certains de ses assistants diront bien plus tard, qu’il ne pouvait pas rester seul dans son atelier, et que c’est pour ça, qu’il s’entourait d’autant de gens. Très peu de ceux qui vécurent ces années-là dans son sillage réussirent à sortir leur épingle de ce jeu un peu pervers.

Il était des superstars de la Factory financé et promu par Warhol mais avait-il réellement une personnalité propre ? Gérard Malanga, cinéaste, poète et photographe répond dans une interview sur le site Internet de www.filmdeculte.com à la question suivante : En dehors de Flesh, Trash et Heat, avez-vous travaillé de près ou de loin sur d’autres films de Warhol ? « C’est une question qui, pour moi, n’a pas de sens. Andy Warhol ne faisait que produire ces films, toutes les idées venaient de ceux qui tournaient les films. Avant que j’arrive à la Factory, quelqu’un d’autre se chargeait de la mise en scène. Tous ces films qui existent et qui sont supposés être de Warhol ne le sont en fait pas du tout. Il apportait l’argent et faisait travailler quelqu’un d’autre. En France, est-ce que vous parlez des films d’Alain Sarde ? »

Warhol est également le génial initiateur du Velvet Underground, un groupe de musique mythique, le dessinateur de la célèbre pochette de disque des Rollings Stones avec une fermeture éclair, l’inventeur du magazine Interview qui fait encore parler de lui aujourd’hui. Mais aussi, un être dyslexique, inculte et un radin pathologique, qui a accumulé pendant des années des milliers d’objets, montres et bien d’autres choses dans des pièces condamnées. Reste que la production de Warhol a profondément marqué les années 60. Il est un des meilleurs artistes du Pop Art américain. La répétition de 4 fleurs en gros plans, séparés par des couleurs fluorescentes, et pourtant toutes pareilles, obligent notre regard à se déporter et à regarder les choses autrement. Aucune image n’est vraiment identique à l’autre. Andy Warhol parlait de ce que l’on écrivait sur lui de la manière suivante : « Ne fais pas attention à ce que l’on écrit sur toi, contente-toi de le mesurer ». Sur mon écran d’ordinateur, cela fait 21 centimètres, « J’espère que tu es content Andy »

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